Les "humeurs du supporter" (9)

MERCREDI, 15 JUIN 2016, 23:43 - Bomber
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OPINIONS

Claude m'a envoyé un message dans lequel il nous livre analyse du "jeu" du Sporting extrêmement intéressante.



"Je suis le Sporting d’Anderlecht depuis 1960. Je voudrais livrer ici quelques réflexions, en me focalisant essentiellement sur le jeu. 

Dans les années ’60, sous l’impulsion de Pierre Sinibaldi, le RSCA développa un jeu moderne, en avance sur son temps, qui influença ensuite l’Ajax et jusqu’à Arsenal. Lorsque le Sporting, après des premiers matchs européens catastrophiques, élimina le grand Real Madrid au Heysel (26/09/62), cela fit l’effet d’une bombe. France Football, dans un long article très argumenté, fit une analyse précise du jeu d’Anderlecht pour comprendre comment cela était arrivé. On peut résumer ainsi le jeu du RSCA de cette époque : un jeu très technique (à l’époque, on savait faire une passe réussie…), fait de passes redoublées ; un jeu souvent en un temps, marqué par des une-deux en zone de conclusion. C’est très important. Comment ce jeu, caractéristique d’Anderlecht, son image de marque, s’est-il perdu ? 

On se plaint souvent ces dernières années de devoir jouer contre des équipes qui ‘’bétonnent’’. Sauf à avoir des Rensenbrinck, des Boussoufa ou des Suarez, il faut compenser par des automatismes poussés. À l’époque (avant l’arrêt ‘’Bosman’’), les équipes étaient stables d’une année à l’autre et les joueurs souvent fidèles à leurs couleurs. Donc les automatismes fonctionnaient à fond. Ce n’est plus guère possible aujourd’hui, sauf à tout faire pour garder une stabilité dans la compo de l’équipe d’une année à l’autre, ce qui est devenu rare. La culture du une-deux a disparu : elle serait pourtant bien utile pour dynamiter des défenses regroupées.

Deuxièmement, je crois qu’il y a eu un changement de philosophie dans le club, lorsque le jeu de nos adversaires, le Standard, mais surtout Bruges, commença à nous créer des misères et contester notre suprématie, avec des résultats. Du coup, des voix s’élevèrent pour réclamer plus de ‘’muscle’’ dans notre jeu. On en voit aujourd’hui les séquelles. On a oublié les fondamentaux. Alors que nos équipes de jeunes restent pourtant dépositaires du beau à l’anderlechtoise, l’équipe première a perdu le nord. Trop de joueurs venant de l’extérieur n’ont pas fait leurs classes au Sporting et appris ‘’la manière anderlechtoise’’. Et nombre d’achats de joueurs ne correspondent pas à notre philosophie légendaire. 

Troisièmement, il manque à Anderlecht aujourd’hui des joueurs capables de verticalité. Non pas des joueurs qui savent faire une passe tranchante. Non pas des artistes qui jouent les Messie. Mais des joueurs qui sont capables de perforer une défense. Souvenons-nous de Versavel ou de Czernia.

Quatrièmement, nous n’avons plus de joueurs capables de tirer de loin. Souvent. Et de les mettre au fond. Genre Ludo Coeck, Luc Nilis ou Enzo Scifo. À l’époque de Nilis, quand on jouait en Coupe d’Europe, je jubilais lors du match away parce que je savais, j’étais sûr, qu’il en mettrait une au fond. Il m’a rarement décu.

Cinquièmement, la gestion des coups de pied arrêtés est une catastrophe. Coups francs approximatifs, corners mal donnés, etc. Où est passée la technique ? Quand on n’a pas d’artistes, quand on n’a pas d’automatismes, la gestion des coups de pied arrêtés peut, doit faire basculer un match. Pour l’adversaire, il faut pouvoir lire la panique dans les yeux quand on siffle un coup franc pour les mauves. Et naturellement, savoir provoquer ce genre de fautes. Là, on n’est nulle part. Il suffit de regarder (pas trop longtemps, ça ferait mal aux yeux) du côté des blauw and zwart pour voir une différence. 

Enfin, il faut un fond de jeu, idéalement, qui soit le même depuis les équipes d’âges jusqu’à l’équipe A (cf Ajax). Et un entraineur avec une vraie vision de jeu, élément qui nous manque tant depuis le regretté Jean Dockx. 

Il y aurait plein d’autres choses à dire sur la gestion du club, mais je ne voudrais pas lasser le lecteur. Un fils Vanden Stock plus adepte du golf que du foot, un Philippe Collin qui tire les ficelles et un Van Holsbeek à la gestion chaotique, plus le passage douloureux d’une gestion familiale à la culture d’une société anonyme, le mal est bien plus grand qu’il n’y parait. Il est urgent de doter le club d’un vrai connaisseur (un ancien ?) qui joue enfin le rôle de manager. Et de laisser à notre ami Herman ou un autre l’inévitable paperasse. Acheter un brésilien pour jouer au back alors qu’il est numéro 10 montre qu’on a vraiment touché le fond.

Le challenge est simple, mais périlleux. Ou le Sporting s’en sort, se renouvelle, renaît de ses cendres actuelles ou il finira comme l’Union Saint-Gilloise ou le RWDM à ne gérer que de lointains souvenirs. Je formule le meilleur, mais je crains le pire." 





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